Il est impensable de reproduire le tour de force comique ci-dessous de nos jours. Le niveau culturel moyen des Français est tellement médiocre que pratiquement personne n'en saisirait toute la substantifique moelle. Déjà, appeler un parti politique canular "le Parti d'en Rire" est désormais incompréhensible . Qui connais l'expression "prendre le parti d'en rire" ? Et qui va "kiffer grave" le Bolero de Ravel au point de l'utiliser comme hymne officiel de ce(tte) parti(e) de rigolade ? Vous avez écouté les chansons de campagne des candidats de 2012 ? Et qui serait capable de le chanter, le Bolero ?
A cette époque lointaine, tout le monde a fait des efforts : les Gaullistes, les Communistes, L'école publique, les écoles privées, la radio, la télé ; et ça payait ! Les comiques étaient intelligents, brillants et leur humour n'en perdait pas pour autant en causticité, tout au contraire. Vous connaissez le sketch de Fernand Raynaud sur les paysans ? Il est ravageur. Et les Branquignoles ? Robert Dhéry et sa bande (de Funes en tête) inventaient alors un non-sens débridé à la française ; prolo et généreux (revoir "Allez France!"). Et Robert Lamoureux ? Coluche lui doit tout et il est moins bon ; vulgaire, grossier et démago.
Rire de tout ? Tourner tout en dérision ? On voit le résultat. Les blagues décomplexés qui fusent maintenant à tout va sur les homos, les beurs, les blacks, les noiches, les femmes (blondes) et le reste, voilà ce qu'on lui doit à ce connard. Tous égaux dans le mépris de l'autre. Et aussi, l'idée que la politique c'est de la merde ; que si on veut on peut, en remuant la merde des bons sentiments (et surtout en se passant de réfléchir) ; que le show-biz c'est mieux ; que ces gens-là ont du CŒUR, les enfoirés ! Mon œil oui ! Et "Intouchables", c'est fait pour rassurer qui sur son bon CŒUR, les chiens peut-être ? Tous les méprisants confortables de France et de Navarre, non ? Et avec Coluche, attention, on ne plaisante pas ! Un philosophe, cet homme, une conscience.
Ah, l'adorable petit camion qui lui a coupé la Harley et la chique ! Les routiers sont sympas, la preuve : il a fallu utilisé le 38 tonnes accidenté pour amener la connerie de Coluche à l'hosto, avec le pitoyable reste de sa carcasse. Pitoyable ! voilà bien ce que Coluche m'inspire comme qualificatif. Grâce à ce monsieur les bars-pmu résonnent des graves sentences des Pères, entre deux demis ; et les enfants désinhibés, eux, se pissent mutuellement dessus sur facebook, dans les cours de récrés, ou en direct sur NRJ. L'humiliation comme moteur. Coluche comme accélérateur, définitivement !
Bon, je me calme, je décompresse et je réécoute le Boléro de Ravel par Messieurs Dac et Blanche.
Ensuite, la poésie reprend le pouvoir avec cette chanson du même Ravel sur un poème de Ronsard. Le poète y parle de son âme et du Monde ("la commune"). Il se souhaite "Bonne nuit", avant de mourir. Il avait fini par prendre soin d'elle, après l'avoir trop éprouvée à l'Amour et à la Vie, à la Connerie aussi, peut-être (surement). " Amelette, Ronsardelette..." Quelle délicatesse ! Quel tendresse ! Et aussi un brin d'humour, au moment de s'allonger pour dormir à jamais. Ca reste, ça ne bouge pas, car ce n'est ni de la technologie, ni de l'idéologie. C'est de l'Art. Et l'Art, ça rigole pas. Surtout l'Art comique.
Vous avez vu, Dac est limite Hilare tout le temps...
Le texte : A son Âme
Amelette Ronsardelette,
Mignonnelette doucelette,
Treschere hostesse de mon corps,
Tu descens là bas foiblelette,
Pasle, maigrelette, seulette,
Dans le froid Royaume des mors :
Toutesfois simple, sans relors
De meurtre, poison, ou rancune,
Méprisant faveurs et tresors
Tant enviez par la commune.
Passant, j'ay dit, suy ta fortune
Ne trouble mon repos, je dors.
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