Cet an-ci sort un coffret sur l'album mythique des Beach Boys : "Smile". Là, EMI a mis le paquet : une version "définitive" du projet avorté de 66/67, quatre ou cinq CDs bonus de démos, d'arrangements divers, de versions inédites et inachevées des morceaux de ce qui aurait du être le chef-d'œuvre de Brian Wilson, leader et compositeur du groupe. A l'époque, Brian a pété les plombs et le disque, sur lequel il travaillait sans relâche depuis des mois n'a pas vu le jour, et, pendant que son créateur était soigné pour une dépression monstrueuse, les autres Beach Boys tirèrent ce qu'ils purent des centaines d'heures de bandes studio enregistrées par Brian et sortirent "Smiley Smile". Le "Smile" originel avait sombré avec l'esprit foldingue de son concepteur. Quelques chansons avaient néanmoins été finalisées et on les retrouve sur "Smiley Smile" puis, au compte-goutte, sur les albums suivants des Beach Boys : "Cabinessence" sur "Friends ou "Surf up" sur ..."Surf up".
Je ne vois pas très bien l'intérêt de ce genre de publication quasi exhaustive. Puisque le maître d'œuvre a perdu la boule en cours de montage, et que lui seul détenait la clé de voute de cette magnifique cathédrale engloutie, à quel besoin peuvent bien répondre ces heures d'enregistrement rendues publiques ? Brian ne sait pas plus aujourd'hui qu'au moment où il est devenu cinglé, ce qu'il avait exactement en tête. C'est perdu, disparu, vanished. Le peu qu'il a pu finir, il l'a fait et c'est indéniablement génial. Les chansons pré-citées, plus "Heroes and Vilains" et "Good Vibrations" sorti à l'époque en guise de teaser à l'album. Et après ?
Après, il nous reste des traces, et des hypothèses mais rien qui puisse s'approcher d'une création voulue, pensée et menée à bien par un artiste et donc, pas grand-chose.
Si, quand même, il reste aux fans du groupe la possibilité de "rêver" leur "Smile", en écoutant les différentes variantes des morceaux qui sortirent de la tête de Brian Wilson et entre lesquelles il ne cessa jamais d'hésiter, à de trop rares exceptions.
Pendant ce temps-là, un artiste contemporain, en pleine possession de ses moyens cisèle de très belles miniatures symphoniques, dans une relative indifférence. Et pourtant, il réussit là ou Brian Wilson échoua naguère, avec un talent qui ne me parait pas moindre. Il s'agit de Bon Iver.
Mais, le "Hic", si l'on veut, c'est que "Smile" est le Saint Graal des rockeux boutonneux et fiers de l'être ( ces gars-la sont enragés )qui lisent "Les Inrockuptibles". Pour ces cul-terreux le tabou ultime c'est d'avoir du succès. Non, mais imaginez un peu ça ! Etre numéro un des hit-parades dans notre société capitalo-racisto-islamophobe, c'est vraiment ignoble ! Mais alors, ignoble de chez ignoble ! Alors "Smile", pour eux, c'est le panard. Personne, strictement personne n'a pu l'acheter. Il ne circulait, avant le net, qu'en de très rares éditions pirates plus ou moins bien faites et hors de prix. Wilson était devenu dingue, aucune chance qu'il retourne un jour y mettre la main. C'était un chef-d'œuvre oublié, pour Happy Few, pour initiés, dont je suis sur que la plupart n'aime pas le reste de la production des Beach Boys ; des chansons surfs déchirantes ou joviales d'avant "Smile", ou de celles des albums composés par les deux frères de Brian, Carl et Denis, dont certaines soutiennent haut-la-main la comparaison avec celle du petit génie de la famille, qui, pour le coup, n'en était pas l'unique. Bref il était, et il demeure impossible que quoique ce soit de "Smile" fasse un succès, du coup, c'est l'album parfait. Et entre deux écoutes clandestines on peut toujours continuer à se masturber en cachette sur des photos d'Anna-Nicole Smith, (chut,il ne faut pas le répéter !), avant de faire l'apologie du cinéma kurde underground (zéro).
Avec les frangins Assayas, Bayon et d'autres têtes de nœud de cet acabit, on en est toujours là, malheureusement. Je remarque qu'on les voit moins en ce moment, mais il est vrai que j'ai arrêté la télé chez moi, alors, le pire est à supposer. Je sais pas moi, Frédéric Bonnaud à la tête d'Arte ?
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