Pour Nerval tout à basculer avec ce qu'il appelle lui-même " l'épanchement du rêve dans la réalité" Ca a donné des strophes sublimes comme celles là :
FANTAISIE
Il est un air pour qui je donnerais
Tout Rossini, tout Mozart et tout Weber,
Un air très-vieux, languissant et funèbre,
Qui pour moi seul a des charmes secrets.
Or, chaque fois que je viens à l'entendre,
De deux cents ans mon âme rajeunit :
C'est sous Louis treize; et je crois voir s'étendre
Un coteau vert, que le couchant jaunit,
Puis un château de brique à coins de pierre,
Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs,
Ceint de grands parcs, avec une rivière
Baignant ses pieds, qui coule entre des fleurs ;
Puis une dame, à sa haute fenêtre,
Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens,
Que dans une autre existence peut-être,
J'ai déjà vue... et dont je me souviens !
Bien des années plus tard, le même épanchement apparaissait dans une chanson de Whitfield et Strong interprétée par les Temptations. C'est à ne pas croire, non, l'inverse, ça donne l'opportunité de croire tout court. En quoi ? Devinez, Frères Humains qui avant et après nous vivez.
2 commentaires:
Mon Rêve familier
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime,
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.
Car elle me comprend, et mon coeur transparent
Pour elle seule, hélas ! cesse d'être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.
Est-elle brune, blonde ou rousse ? --Je l'ignore.
Son nom ? Je me souviens qu'il est doux et sonore
Comme ceux des aimés que la Vie exila.
Son regard est pareil au regard des statues,
Et pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.
Paul VERLAINE, Poèmes saturniens (1866)
Merci pour ce poème. Je préfère de loin Verlaine à son amant Rimbaud. Le jour où j'ai compris qu' "Une saison en Enfer" était le simple récit d'une crise psychotique délirante et comment Rimbaud s'en était sorti ce texte a perdu son aura hermétique qui d'ailleurs ne m'intéressait guère, j'ai pu tirer une croix sur lui et sur "Les illuminations". Seules les poèmes de jeunesse retiennent encore mon attention, et encore, si peu finalement.
" Paysan" comme il disait, il n'y est jamais parvenu. Moi, si.
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