dimanche 28 septembre 2014

Il n'était pas utile que Pauvert publie les livres de B.B.

Ce 28 septembre 2014 est un jour bien triste. Brigitte Bardot vient d'avoir 80 ans et non, ce n'est pas ça qui est triste, ça c'est plutôt sympa. Ce qu'il l'est, c'est que cette femme, que Michel Piccoli qualifiait il y a peu encore de "charmante" (et je suis certain qu'elle l'est), soit devenue un porte-drapeau d'un parti d'extrême-droite nauséeux et dangereux. Je n'aime plus beaucoup le cinéma mais, comme le disait Serge Daney, une de ses fonctions était d'assurer la différenciation des sexes à travers les acteurs-icônes imparables, modèles absolus, inaccessibles et pénétrants et structurants toutes les psychés. Ceci nous a permis de voir sur les écrans de très beaux spécimens mâles et femelles de l'espèce humaine. Bardot fut l'incarnation de la féminité par excellence pendant une dizaine d'années où chacune de ses apparitions sur les écrans suscitait immanquablement le désir de TOUS les hommes. Pour elle, ça a été dur à porter, pour nous, même 50 ans plus tard, c'est un pur délice. Bardot, c'est le sucre-d'orge que TOUS les hommes ont envie d'avoir entre leurs mains, entre leurs lèvres, sur le bout de la langue et ça m'ennuie que ce doux "candy" sente aussi mauvais aujourd'hui. Ça me gâche sa vieillesse, qui m'appartient de droit, comme le reste. C'est aussi ça, le cinéma.
Et puis l'éditeur Jean Jacques Pauvert est mort aujourd'hui a-t-on appris. Je ne sais pas où il en était avec la littérature et l'édition. Assez loin apparemment, reclus au Lavandou après ces trois A.V.C. En tout cas, il a redéfini les contours d'une profession passionnante, celle d'éditeur. Tout le monde lui doit d'avoir rendu l’œuvre de Sade accessible, après un procès au long cours avec la censure dont il sortit vainqueur; moi, je lui dois en particulier d'avoir ré-éditer les œuvres complètes d'Elie Faure, véritable baume esthétique, le Littré, dictionnaire invraisemblable et indispensable, et la collection "Libertés", reconnaissable entre mille avec son format allongé et sa couverture papier Kraft. Là, avec l'aide de Jean-François Revel, il a donné asile a toutes les pensées qui échappaient, qui s'échappaient, qui faisaient rudement du bien. En général, il a secoué le cocotier et en a fait tomber des dattes, ce qui n'est pas mince, convenons-en, et ce qui en fait un des éditeurs les plus brillants du XXeme siècle. Dans le Monde daté d'aujourd'hui, on peut lire ces mots, écrits par lui à 19 ans dans un manifeste, qui définissent à merveille le métier d'éditeur et aussi, en creux, celui de son partenaire dans le crime, l'écrivain :« Nous n'avons pas envie de nous engager. Nous n'avons pas l'esprit de sacrifice. Nous n'avons pas le sentiment du devoir. Nous n'avons pas le respect des cadavres. Nous voulons vivre. Est-ce si difficile ? Le monde sera bientôt aux mains des polices secrètes et des directeurs de conscience. Tout sera engagé. Tout servira. Mais nous ? nous ne voulons servir  à rien"
Quand on est éditeur ou écrivain il est vital d'être libre et "dégagé". Ne servir à rien, c'est être utile à tous. Tout lecteur un tant soit peu de bonne volonté trouvera matière à lire et à s'aérer la tête, en se la prenant parfois, dans les livres édités par Jean-Jacques Pauvert. Sinon, il y a "The Voice Kid", sur TF1. Ça, ça engage plus que tout.
La collection "Libertés" :

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