Good news from the modern man.

 Je ne dis rien mais je n'en pense pas moins. Je parle du monde enchanté du Rock. Je viens de là et j'y retourne. Ce n'est ni mieux ni pire que la terre du cinéma, de la poésie, de la peinture. Voici quelques actualités, démodées ou pas, de ce monde merveilleux où il fait bon vivre et mourir, respirer quoi.

Et toi qui me juges du haut de ta tour d'ivoire de politique et de morale, va chier !

Le Rock plus fort que le Vintage.

- Le Rock est mort ?

- Mort et enterré, on te dit !

- Comment ça ?

- Avec Bowie, avec Lennon, avec Lemmy, tout le toutim, on te dit !

- Ben, on a du l'enterrer avec un portable et il appelle...

I can't stand the rain, bringing back sweet (bad, good?) memories...

 Il pleut. Cette fois-ci, encore moins qu'à l'accoutumée, ce n'est pas anodin. Vous ne sentez pas l'importance, l'influence de la pluie ? Qui vous a élevé ? La pluie qui tombe, les larmes qui coulent, c'est le B.A. BA. Bof ? Commencez donc par ça, ce bon vieux Verlaine.

Je me lamente sur Lamont.

 Lamont Dozier est mort.

Que dire ? Qu'il faut oublier vite-fait Olivia Newton-John et ses chansons idiotes et kitschs qui ne m'ont jamais arraché qu'un ennui assez étonné par l'ampleur de leur audience. Répéter à satiété qu'il a été, avec les frangins Holland, l'un des plus gros pourvoyeurs de hits pour la Tamla Motown à une époque un peu bizarre où les numéros unos des Charts étaient parfois (souvent) des chefs-d’œuvre. Dire encore qu'il a sorti dans les années 70 des albums essentiels à tout amateur de Soul un rien charpenté, dont un qui s'appelait "Black Bach" et que tous les albums de classique enregistrés de nos jours par des petits blancs bien propres sur eux devraient s'appeler "White Dozier" (à qui ça poserait un problème ? Les cons sectaires ? Basta ! Ca serait la classe !) Redire à tous que ce type a composé et gravé, comme auteur-producteur-chanteur, parmi les plus belles chansons d'amour de tous les temps et lui savoir gré de ça, finir par l'écouter encore et encore, lui et ses interprètes gracieux, dont la liste est une litanie de saints rocks. Hosannah au plus haut des cieux, frères ! I believe in Rock n'Roll ! Let's hear that good, good stuff !

Changement de tonalité et pochette improbables mais vrais.

" Un jour, j'ai vu une pierre pleurer." Loulou (Un des neveux d'Oncle Rock).

 - Oncle Rock ?

- Oui, les Kids.

- Tu pleures ?

- Oui, c'est la chanson. La Soul, c'est comme ça. Ça me fait frissonner tout le corps. Je me rappelle. Je me rappelle. Ça monte, ça déborde, ah, j'en veux encore.

- De quoi l'Oncle ?

- De la musique, de l'amour, des frissons. Mais surtout de la lumière. De la lumière comme on en trouve au mois de juin. Cette lumière-là, triomphante, invincible, implacable.

- Tu sais, l'Oncle, on pense tous les trois que t'as le droit à deux ou trois tours de manège supplémentaires. Tu mérites. On t'aidera.

- C'est gentil, mes neveux.

- L'Oncle ?

- Oui les Kids.

- On t'aime, tu sais.

- Bande de petits salopards !....(Et l'Oncle de pleurer encore un peu plus, beaucoup plus, comme un con.)

La mort sûre du Rock.

Y'a quelque chose de mortifère, de sombre dans le Rock. Il porte en lui la destruction de ses promoteurs et de ses amateurs par une overdose de jouissance. C'est comme ça, une belle, une magnifique impasse. L'ultime. Le top c'est de ne pas durer, un ou deux tubes, 27 ans maxi, et mourir. En pleine gloire, en pleine jeunesse, partir, tirer l'échelle, dans un éclair, dans le tonnerre. Les Stones sont en train d'inventer quelque chose d"autre, avec Dylan et McCartney : la foudre fatiguée et étincelante venue de l'EPAHD. Est-ce que c'est valable ? Personne n'en sait rien, personne n'était allé par là avant eux. Ça se vend en tout cas, et cher. A la base, n'oublions pas le credo Rock : jouer fort, mourir jeune, laisser un corps propre. Jouir et mourir vite. Parce que rien n'a de sens que ça. A mon avis, c'est faux, et ça mène à des indignités mais je ne veux entendre personne dire que c'est idiot. La Grâce, une certaine Grâce, moderne et fulgurante, est à ce prix. Ce n'est pas in-entendable, incompréhensible, même si c'est déraisonnable. Ça vaut mieux que de vieillir en devenant d’extrême droite. Beaucoup, beaucoup mieux.

Dani vient de mourir. Qu'est ce que ça peut faire ? Rien, c'est tard, trop tard, pour elle, pour nous, mais elle a laissé des traces, éternelles, qui prouvent que la Grâce, elle connaissait. Accroche-toi et meurs. Le shoot ultime, con, c'est là, juste en-dessous. (Si vous voulez une "solution", lire "Passage du poète" de Charles Ferdinand Ramuz. ou la Bible ou le Coran, c'est ce que je connais de plus costaud. Danser, c'est bien aussi

).

En viellissant, je mute Je deviens ma mère.

"Cruel Country" de Wilco. Cet album des rockers de Wilco fait du bien à la Country qui jacte un peu trop Trump à mon goût en ce moment. A ré-écouter aussi, des vieux Lambchop avec la voix susurrée de Kurt Wagner sans l'auto-tune qui est un truc de racailles de droite. C'est beau comme du Townes Van Zandt, d'ailleurs Wagner l'a connu dans les bars de Menphis (Tennessee)

Crache ton venin !

 -Oncle Rock ?

- Ouais..

-T'as déjà craché du rebord du Monde ?

-Un peu, mes neveux. J'y suis allé là-bas et j'ai arrosé tant que j'ai pu.Y'avait que ça à faire. Ou tomber et mourir. Alors, mes trains de glaires ont éclaboussés les étoiles du dessous et du dessus, ternis les dragons de feu qui se trouvent là. M'en suis donné à coeur-joie. Le foutre, aussi. J'ai rien engrossé dans cette terreur blanche et infinie, j'ai même pas joui. Mais j'ai donné, donné et j'ai eu raison. J'y croyais plus fort qu'au bout du monde à mes crachats violets et borgnes (c'était ça ma force) et la musique qu'ils faisaient a gagné.

- C'était quoi la zique ?

- Gary Numan et Tubeway Army, à la limite de l'audible. Des symphonies de mutants mal bronzés

- Maintenant, c'est...

-Oui, je sais, je suis au courant.

"Breathe deep..."

Mon air est vicié. Il me faut de l'air frais, j'étouffe doucement. Oh, air frais ne veut pas forcément dire neuf. Mais au moins, même venu du temps des pyramides et des slide-guitares, inouï; même un peu jauni, de l'inédit pour mes petites oreilles. Parfois les poires sures rafraîchissent le mieux et les vieilles tambouilles débarbouillent. Tenez, le vieux Skorecki, il est si juvénile, so young at heart. Au moins (c'est pas trop demander) attendre que le mien pète en bonne compagnie. Ici, de bien belles jeunes femmes. Là, de vieux amants qui font les beaux. Un chant éternel. Un autre Tu voies Arno, t'es pas tout seul pour les chausettes reprisées.

Arno, c'est toi ma mère.

Arno mort ? Christophe mort ? Alors, de loin, de très loin peut-être ce qui reste en la mémoire, fort, très, très fort :

Et un autre, qui chante dans nos têtes, de très loin, de tout près. T'es fatigué de gueuler ? Chante, abruti. C'est souverain. Souverain ? Souverain !

Christophe mort à la campagne ? Collector !

Il faut chercher, il faut bien chercher pour trouver un Christophe agreste, campagnard. Mais une fois qu'on l'a dégotté on est bien récompensé. Il est au meilleur, justement parce qu'il est loin de chez lui. Déterriorisalisation porteuse, émouvante. Et encore les images de la ville ne sont jamais bien loin. Là, c'est le repos, le loisir, l'ennui. Où est l'espoir ? Vas-y Christophe, chante pour moi qui vis aux champs ! Hey mec, t'es collector ? Tu m'étonnes, John !

Santa Close ta gueule !

Noël et le Rock ce n'est pas toujours aussi tendu que dans ma tête déglinguée. Des fois, ça fait même très bon ménage. La tradition des albums ou des chansons de Noël par les artistes américains est vénérable et actuelle. Elle a donné naissance à de véritables beautés à la carrosserie rutilante comme celle du char de Santa. Ah, déjà, voyez-vous, le vers est dans le fruit, car la motorisation ne suit pas toujours. Mais enfin du "Santa Claus is coming to town" de Springsteen en passant par le "I Believe in Father Christmas" de Greg Lake jusqu'à l'album parfait du Peter Pan du Rock "A Christmas gift by...", le vrai, j'ai nommé Phil Spector, tout ces trucs et azimuts sont bons et estimables. Ouais. Le problème est le suivant : Noël est lénifiant. Le Rock c'est tout le contraire, ça énerve. Pour résoudre cette équation, certains artistes vont chercher quelque chose de l'enfance, de l'ambiance de conte de fées de Noël, de l'excitation des enfants et en injectent dans leur Rock, d'autres vont aller vers la pompe, l'office, le grandiose, une petite part parlera sans emphase du Christ, surtout du coté de la Country. Là, il est question de naissance. Tout homme, et donc tout rocker, peut comprendre de quoi il en retourne; de la souffrance particulière attachée à la première, des autres qui la suivront quand il faudra changer de peau pour continuer à vivre (et tout ça sous l'oeil de Dieu). Mais là encore le bât blesse, car la plupart des rockers sont des impies qui ne croient qu'à la puissance de leur son et à la séduction tragique de leurs gueules de petits démons. D'où l'aberration ci-dessous où deux Pistols et trois Thin Lizzy, groupes sulfureux s'il en fût, tentent, sans rire à gorge déployée, une prière de Noël pour leurs fans. C'est gentil de leur part mais c'est idiot. Je dois avouer que je trouve ça assez drôle.