C'est vieux, enfin un peu. Pas tant que ça. Les États-Unis étaient un ailleurs absolu, un Autre majuscule qui inondait la France d'images, de sons, de chants et de danses, venus des profondeurs du pays, tout au fond et qui bousculaient tout, changeaient tout jusqu'à nos perceptions et nos affects. Ce qui fait le corps et l'âme d'une terre est parvenu jusqu'à nous et a modifié nos âmes et nos corps. Nul n'a été pareil après John Wayne, Gary Cooper, Marilyn Monroe, Elvis Presley, Otis Redding, Louis Armstong, Neil Armstrong. Robert Crumb, Andy Wharhol, Mohamed Ali. On a parlé d'hégémonie et crié "US go Home". Mais l'impact des coups sur les yeux, les oreilles, TOUS les sens, a été beaucoup trop fort pour que tous, en France, nous n'en soyons pas changés d'une manière ou d'une autre, le plus souvent en ravivant nos envies et en en créant de nouvelles. Les plus hardis y sont allés voir et en sont revenus transformés à jamais, plein d'images d'Epinal pour les pires (Labro), et plein d'énergie nouvelle pour le reste de leur vie pour les meilleurs (Skorecki, Jean Clair, Demy et tant d'autres). Ils ont tous été brillamment français (Qu'est ce que ça veut dire ? C'est une autre question. Pour ce coup-ci mettons vieux-monde...), complètement frappés d'U S A, tous originaux, tous valides et valables jusqu'à plus soif. Et après que cette soif est devenue inextinguible, "Bigger than life", d'une dimension nouvelle et altérée d'alcools différents, ils sont tous devenus des Maîtres à suivre, à aimer et à envoyer paître. Amen ("Ouvrons Le Livre et chantons etc,etc..."Je suis pour ma part à cinquante pour cent américain.)
Une des dernière fois où les Etats-Unis ont eu cette dimension unique et séminale, ce fut dans les seventies, avant que la puissance du business ne vienne fracasser tout et tous pour le meilleur et pour le pire, avant que Wenders ne tourne "Paris -Texas", avant Percy Adlon et avant les Pixies et Husker Du qui braillaient déjà leur désespoir pour des cyniques à la Bret Easton Elis. Tout ce qui vient de cette décennie et de là-bas, intrigue, frappe, retourne. Des claques qu'on prend, encore et toujours. La Preuve ? Écouter d'un peu près les quelques chansons qu'on a retrouvées de Karen Black, actrice phénoménale, qu’Hitchcock avait choisie pour son ultime film (où elle excelle), capable de supporter un aussi mauvais film qu'"Easy rider" et d'illuminer "Five easy pieces" Elle en est la démonstration ultime. C'est d'une beauté touchante et renversante et ça vient chatouiller furieusement nos ouïes engourdies par d'autres décennies de satanisme cheap. D'où viennent ses brimborions hantés et généreux ? De là-bas justement, de ce pays où on est un peu plus grand, pas forcément plus con et toujours à cheval (sur quoi ? à voir...), où l'Autre est un démon ou un dieu, et qui échoue, pour l'instant, à accoucher d'une autre humanité. Là-bas, on regarde vers le désert et ça arrive. Quoi ? On ne sait pas encore mais on va pas tarder à le prendre dans la gueule.
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