jeudi 26 mai 2016

Fin de la lutte continue dans le triomphe d'un matin.

Mes larmes ont ce goût-là. Le même goût depuis l'enfance.
Donné par l'apreté du combat, l'acharnement à faire mal, l'envie de vivre, l'envie de mourir, le sentiment de perte qui serre la gorge dès le commencement, la déchirure intérieure, le manque de repos, la fatigue guerrière, les insomnies d'effroi, l'usure prématurée, l'impression de suivre un ordre précis qui n'est pas le mien, les contraintes contraires, l'oblique à redresser sans fin, le charivari constant, toutes ces choses et bien d'autres qui ont laissé mon coeur blessé à jamais.
Ennio Morricone, génial.

vendredi 20 mai 2016

Les Paradis se perdent toujours.

Laissons le chanteur Slimane à ses forfaitures incongrues, Amir à ses paroles en anglais (pendant que les Autrichiens, les migrants au cul, chantent en français), Christophe Maè à sa recherche d'une idée désormais vieille en Europe, Keren Ann à ses plaisanteries hipster yiddish et faisons ensemble un tour dans les grandes allées de la ballade française de qualité, on y respire un air toujours pur aux qualités régénérantes indubitables.
C'est parti. Christophe : "Les Paradis perdus".

Alain Bashung : "L'apiculteur" (live)

Arno : "Les filles du bord de mer".

Nino Ferrer : "l'Arbre noir". (Le guitariste me laisse à genoux).

Léo Ferré : "Ton style". Je ne vois de plus beaux mots d'amour à dire à une femme. Brigitte Fontaine est d'accord avec moi.



Il y avait même Sergio, le fils maudit.

Je vais mettre ci-dessous une chanson de Serge Gainsbourg. Elle est tirée d'un album que je n'aime pourtant pas beaucoup, "L'homme à la tête de chou", sur lequel je trouve Sergio un peu trop "facile". Ca n'a pas la tenue de "Melody Nelson". Mais les paroles de "Marilou sous la neige" sont belles et tiennent en l'air presque sans musique. De la poèsie, quoi. Et surtout Gainsbourg fait l'effort de chanter, comme David Bowie, comme Prince, comme Bob Dylan, comme Caruso et il chante drôlement bien. Notez comme il dit "...la fraicheur de l'inédit...", et pas "...la fraicheur de l'innocence...". Il connaissait son Baudelaire, l'homme Gainsbourg.
En-dessous, je vais en mettre une autre, aux paroles splendides et aux arrangements impeccablement distanciés, juste ce qu'il faut pour aborder le sujet, plutôt tabou, plutôt casse-gueule. Résultat, ça passe, et même bien. Je mets les lyrics encore en-dessous.

Oh my Lady Héroïne
Oh ma beauté ma divine
Referme sur moi tes ailes
Mon bel ange ma toute belle

Oh my Lady Héroïne
Ma liaison clandestine
En douceur mon sucre candi
Emmène-moi au paradis

Oh my Lady Héroïne
Oh ma beauté ma divine
Toi mon amour platonique
Mon bébé ma fille unique

Oh my Lady Héroïne
Aussi pure que Justine
Tous les malheurs de ta vertu
Et tous ses bonheurs me tuent

Oh my Lady Héroïne
Dans ta beauté je devine
Quand ton regard me transperce
Tous les charmes de la Perse

Oh my Lady Héroïne
Mon opium ma cocaïne
Est-tu venue d'Extrême Orient
Ou bien d'un marché persan

jeudi 5 mai 2016

Morris and I.

Il a beau s'avancer masqué, sous la défroque du gigolo mariole mi-pathétique, mi-hilarant, Morris Day a mis au point une machine à danser implacable : son groupe The Time. Avec lui, il joue les méchants dans les films de son ami Prince, ou plutôt son double maléfique, c'est le deal. Et il est presque aussi talentueux que l'était Prince, c'est le miracle derrière le deal. Pour preuve la tuerie groove ci-dessous. C'était peut-être l'apogée de la comédie dell'Arte que jouait Morris Day dans son rôle de Matamore. Frime, frime, frime, il en restera toujours quelque chose. Mouchoir blanc à la Barry White, pas de danse à la James Brown, Jesse Johnson à la guitare qui joue comme un droitier sur une guitare de gaucher à la Hendrix, et CA c'est du putain de rap. "I don't know, when i see something that i like, i got to go for it, and I like what I see, Baby..."
The Time : "Jerk out".

mercredi 4 mai 2016

Prince, Bowie et un je-ne-sais-quoi en plus.

La classe, ça existe. David Bowie avait la classe. Dans son genre Prince l'avait aussi, ce truc; ce je-ne-sais-quoi qui fait qu'on remarque votre présence, qu'on la sent. C'est quoi ? Oh, un peu de tout : les fringues, la posture du corps, le regard, les gestes, deux ou trois objets comme une cigarette et une chevalière, la démarche, le timing surtout. Etre là, où il faut quand il faut, comme un bonus au monde tel qu'il va qui devient lentement évident, vital, qui impose sa marque sans brusquer les choses, à la coule. La classe fait qu'on vous distingue de la masse bourdieuesque des clodos de la vie (les fringues de Bourdieu !) et des ploucs. Aldo Maccione a très bien parodié la classe. Si on peut en faire un truc comique, c'est que ça existe bel et bien; c'est à ça qu'on reconnait l'existence d'une chose aussi évanescente que la classe.Attention ! On peut être classe en 2 CV, en punkette, en pantoufles (à talon, avec un désabillé et du parfum pour les femmes; avec une robe de chambre en cachemire et un verre de Cognac pour les hommes), tout est dans la nuance, l'appui ferme et souple d'une présence; c'est ça, le mot important, "présence", et même, plus net, "prestance". Dans ses films, Prince est opposé à sa caricature et à la caricature de la classe, Morris Day, double vulgaire et concupiscent qui drive son groupe The Time. Tout pue l'ostentation chez lui, la frime à pas cher sous des allures qui exhibent les dollars sans honte, mais sans joie, sans prestance. Nuance. Quand il rit à ses propres blagues, Morris Day, tout le monde se marre; quand un mec qui a la classe fait une plaisanterie, tout le monde est bluffé et certains osent un franc sourire. C'est là que l'on voit les dents blanches des jeunes femmes qui baissent un peu les yeux.
Il existe une chanson que personne ne sait vraiment comment prendre. Ca s'appelle :"Donald Trump, Black version" de The Time. Est-ce que Morris Day y fait vraiment l'apologie de Trump ? Est-ce qu'il se fout de sa gueule de cake ? Je vous donne la réponse. Morris Day, endossant son personnage habituel, fait l'apologie du pognon et de Donald Trump, sans aucun doute MAIS, il s'agit d'un personnage (qui existe vraiment, attention, il y a en plein !) et il ne faut pas le prendre au sérieux. Je vais la mettre en-dessous la chanson, c'est une pignolade, une bouffonerie, mais exécutée avec maestria et talent. C'est tout le paradoxe de Morris Day et de The Time, ils ont un talent fou mais ne sont pas sérieux du tout et, finalement, le "Character" (pour employer un terme dont use Day pour parler de lui sur un album solo) a détruit le bonhomme qui n'a plus rien à dire et à montrer depuis longtemps, enferré dans son image de branleur sans l'ombre d'une classe quelconque. Faire-valoir vulgaire de Prince, c'est pas une vie. Donald Trump, Black version ? Est-ce que l'on peut rêver d'un homme qui ait moins la classe que ce "personnage" ? Tarantino en met plein ses films, non ? Et les gens trouvent ça génial. Mais personne ne dit de Tarantino qu'il a la classe, pas vrai ?