Jacques Rivette est mort et on en fait tout un battage qui n'a aucune justification possible. Nouvelle Vague ? Et alors ? C'étaient des petits branleurs, plus qu'un à enterrer et on tire l'échelle. Politique des auteurs ? L'idée, si j'ai bien compris, c'était de dire que Hitchcock et Hawks sont aussi importants que Balzac, c'est ça... C'est pas faux. Vous avez déjà lu du Balzac ? Moi, je l'ai fait lire à une copine qui aime bien la revue "Voici" et elle a trouvé ça vachement bien. C'est vrai qu'avec lui on en a pour son argent, la moindre virgule pèse son poids de signification, sans doute parce qu'il était payé à la page. Enfin, tout y passe, les gueules qui font sens, les maisons qui font sens, les vétements qui signifient plus sûrement encore que les gueules, d'où les interminables descriptions qui jalonnent une intrigue dont les femmes de son époque (et de la nôtre) étaient friandes car si pleine de sens et d'enseignement (après que le rouge vous soit monté aux joues) qu'on pouvait même en tirer une petite morale bien utile et rêver. La morale, voilà bien une des préoccupations premières de Jacques Rivette mais la morale moi, je m'en tape. Je veux simplement y voir plus clair, même au prix de l'injustice et de la décadence. Je préfère les films qui ont "le" moral à ceux qui nous font" la" morale, pareils pour les livres, vous tirerez toujours plus de profit d'un bon livre mal-pensant que d'un pensum, généralement de gauche (Camus, Sartre, Tournier, Halter, Picouly, Semprun et compagnie),. Vous avez déjà lu du Stendhal ? Très mal-appris Stendhal, oh la la, amoral au possible, il ne s'épanouissait que dans la passion contrariée et adultèrine ainsi que dans un esthétisme nostalgique à tendance jouisseuse. Il pensait qu'il serait lu en l'an 2000. Il avait raison. Balzac avait cependant bien aimé "Le Rouge et le Noir", l'avait écrit et ça avait beaucoup fait rire notre homme Stendhal. Moi, je me fendrais bien la gueule à propos de la mort de Jacques Rivette ou plutôt, c'est si peu important à mes yeux que je m'en polirais bien le chinois s'il n'y avait tout ce barouf énervant autour du divinisé trépassé un peu partout dans les médias.
Bon, Paul Kantner, guitariste, chanteur et compositeur du Jefferson Airplaine est mort. Ca, c'est déjà plus emmerdant car le gaillard avait pondu quelques uns des plus grands hymnes psychédéliques de la fin des sixties, aux alentours de la baie de San-Franscisco. "White Rabbit", chantée par sa compagne, la magnétique Grace Slick, est même une des toutes meilleures chansons Rock de tous les temps (préhistoire et le pléistocène compris). Les chansons, c'est moins fort que les livres, bien sûr, mais c'est surpuissant à coté du cinéma; ça accompagne les gens tout au long de leur existence, ça peut aider à la libération d'un être, même partielle, ne serait-ce qu'à la disparition d'un chagrin, d'un malheur, d'une pesanteur et, inversement, ça peut marquer le début d'une histoire d'amour, d'une amitié, d'une chaleur. Les chansons, c'est vital, les films, c'est mortel. Il n'y a pas de morale ou d'impératifs qui tiennent, j'écoute "White Rabbit", je suis un autre, je suis enfin moi-même, sorti de mon merdier intime, dans la lumière. Vous me direz, peut-être que Jacques Rivette était clair, lui ? Tu parles, il était aux fraises et il aurait mieux fait d'écouter du Rock et de lire Stendhal. A son crédit cependant, un film foudroyant, le bien nommé "L'amour fou". Il fallait au moins ça pour qu'il sorte un peu de ses gonds et fendille l'armure et ne serait-ce que pour ce film-là, carrément rock, il lui sera pardonné pas mal de choses ampoulées et ennuyeuses.
Allez, "White Rabbit", inspiré d'un grand déviant pas moral du tout qui avait un faible pour les petites filles, Lewis Carroll himself. (Eh oui, et ce n'est pas un problème, le problème c'est comment faire pour ne pas avoir un faible pour les petites filles !)
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